L'ACCOUCHEMENT (3)
Le declenchement, La delivrance, les aides instrumentales
Dr Claude Allouche, gynécologue
Ahuza Clinic, Raanana
058 726 02 64
LE DÉCLENCHEMENT ARTIFICIEL DU TRAVAIL,
COMMENT SE PASSE-T-IL EN PRATIQUE ?
Qu’est-ce que le déclenchement artificiel du travail ?
Le déclenchement artificiel du travail (en hébreu « zirouz » זירוז) consiste à anticiper l’accouchement sans attendre que le travail commence naturellement et spontanément. En général, il est proposé par l’obstétricien pour diverses raisons médicales dictées par l’état de santé de la mère ou du bébé. Mais il peut aussi être envisagé à la demande de la patiente (déclenchement de convenance) et discuté avec l’obstétricien en fonction des conditions locales du col utérin.
Conditions d’hospitalisation
Lorsqu’un déclenchement est décidé, l’hospitalisation est indispensable jusqu’à l’accouchement afin d’assurer la surveillance fœtale. En fonction de l’état initial du col et des méthodes utilisées, cela peut prendre un certain temps, jusqu’à 48 heures, voire même 72 heures. Le moment du passage en salle d’accouchement sera décidé par l’équipe médicale en fonction du degré d’urgence et des places disponibles en salle de travail. Il faut donc parfois s’armer de patience, savlanout en hébreu (סבלנות)…
Choix de la méthode de déclenchement
Le choix de la méthode de déclenchement dépendra directement des antécédents obstétricaux (césarienne) et des conditions locales du col utérin, qui seront appréciées par le toucher vaginal. Ce dernier permettra d’évaluer différents paramètres qui conditionneront le choix de la méthode à utiliser selon le degré de maturation du col :
- La longueur du col : long, mi-long, court ou effacé (en France) ou exprimée en pourcentage d’effacement en Israël.
- La dilatation du col : exprimée en centimètres ou en doigts, selon la longueur du col.
- La position du col : postérieur, centré ou antérieur.
- La consistance du col : tonique, mou ou intermédiaire.
- Le niveau de la présentation : exprimée en mobile, appliquée, amorcée ou fixée (en France), ou exprimée en chiffres de -3 à +3 en fonction de la position de la tête par rapport aux épines sciatiques (en Israël).
Un score peut être calculé grâce à ces paramètres, le score de Bishop : ce score, beaucoup utilisé en France (mais apparemment peu en Israël) permet au médecin de choisir la méthode de déclenchement.
Méthodes de déclenchement selon le score de Bishop
A] Si les conditions locales sont favorables (score de Bishop > 5)
La patiente peut être admise directement en salle de travail où deux options peuvent être envisagées :
-
Perfusion d’ocytocine (Pitocin en Israël)
L’ocytocine est une hormone qui favorise les contractions utérines en augmentant leur fréquence et leur intensité. Elle est administrée par une perfusion dont le débit est réglé par la sage-femme en fonction de l’évolution du travail. On commence avec des doses très basses, qui sont augmentées progressivement toutes les demi-heures en fonction de la réponse de l’utérus, jusqu’à l’apparition de contractions utérines intenses et régulières toutes les 3 à 4 minutes. -
Rupture artificielle de la poche des eaux
Cette méthode permet d’accélérer le travail par la libération de prostaglandines naturelles. La sage-femme ou l’obstétricien utilise un amniotome pour percer la poche lors d’un toucher vaginal. Ce n’est pas douloureux. Cette méthode ne peut être envisagée si le col est fermé ou si la présentation est trop haute. Cependant, une fois la poche des eaux percée, il n’est plus possible de renoncer au déclenchement, qui devra se poursuivre jusqu’à l’accouchement en raison du risque infectieux potentiel.
B] Si les conditions locales sont défavorables (score de Bishop < 6)
Une maturation du col sera nécessaire pour le préparer au déclenchement. La patiente est alors hospitalisée dans le service d’obstétrique où des prostaglandines sont utilisées sous diverses formes pour permettre cette maturation cervicale :
- Tampon (Propess) : Inséré dans le cul-de-sac postérieur du vagin, il se présente sous la forme d’un système de diffusion vaginal polymérique qui diffuse progressivement la prostaglandine E2 (dinoprostone) sur une période de 24 heures.
- Gel (Prostine E2) : Ce gel de prostaglandine E2 est placé à l’intérieur du vagin et renouvelé au bout de quelques heures en fonction de l’état du col et des contractions utérines.
- Comprimés par voie orale (Cytotec) : Autorisé seulement en Israël, le Cytotec est une prostaglandine E1 utilisée pour maturer le col tout en déclenchant des contractions. On commence avec la plus petite dose possible, 25 mg, renouvelée toutes les 4 à 6 heures, en fonction de l’intensité des contractions et de l’état du col.
C] Cas particulier : antécédent de césarienne
En cas d’antécédent de césarienne, l’utilisation des prostaglandines est contre-indiquée en raison du risque de rupture utérine. Si un déclenchement médical du travail est indiqué dans ce cas, alors que les conditions locales sont défavorables, une sonde de Foley sera insérée dans le col utérin, et le ballonnet sera ensuite gonflé avec du sérum physiologique. Ce ballonnet sera laissé en place pendant 12 à 24 heures pour permettre la dilatation du col. Son insertion sera réalisée par le médecin après mise en place d’un spéculum sur table gynécologique. La procédure n’est pas agréable, mais n’est pas censée être douloureuse.
D] À propos du décollement des membranes
Le décollement des membranes est une méthode « naturelle » de déclenchement du travail dans le sens qu’elle n’utilise pas de substances médicamenteuses. Il consiste à décoller manuellement les membranes, sans les rompre, lors d’un toucher vaginal. Ce décollement va permettre la libération de prostaglandines naturelles qui vont faire maturer le col de l’utérus. Il nécessite une ouverture minimale du col et que la tête du bébé ne soit pas trop haute. Cette pratique peut être inconfortable et provoquer quelques pertes de sang. Son avantage est qu’elle ne nécessite pas d’hospitalisation : la patiente peut rentrer chez elle immédiatement après, puisque l’effet est progressif et sera ressenti dans les 24 heures suivantes. Son inconvénient est qu’elle ne marche pas à tous les coups et ne suffit pas lorsque le déclenchement est décidé pour des raisons médicales.
LA DÉLIVRANCE – WHAT IS IT? MAZÉ?
Qu’est-ce que la délivrance ?
La délivrance (en hébreu hafradat shilia הפרדת שיליה) correspond à l’expulsion du placenta une fois que le bébé est né.
- Les annexes du fœtus, constituées par le placenta, les membranes et le cordon, ne sortent pas immédiatement en même temps que le bébé.
- La délivrance est donc la toute dernière étape de l’accouchement, qu’on ne considère comme terminé que lorsqu’elle a eu lieu.
- Elle peut être naturelle ou artificielle.
A] La délivrance naturelle
La délivrance naturelle se déroule en trois étapes :
-
Le décollement du placenta
- Il se produit entre 10 et 30 minutes après la naissance du bébé, grâce à la reprise des contractions utérines.
- Un léger saignement peut être le signe annonciateur du décollement placentaire, mais dans tous les cas, la sage-femme ou le médecin devront diagnostiquer le décollement en appuyant légèrement sur le ventre.
-
L’expulsion du placenta
- Lorsque le gynécologue ou la sage-femme sont certains du décollement placentaire, un dernier effort de poussée est demandé pour provoquer l’expulsion du placenta.
- Une fois sorti, le placenta est soigneusement examiné pour vérifier qu’il est complet et que toutes les membranes ont été expulsées.
- Le cordon ombilical mesure entre 50 et 70 cm, il est composé de 3 vaisseaux sanguins (2 artères et 1 veine) et est entouré d’une gelée transparente appelée gelée de Wharton.
- L’ensemble des annexes fœtales pèse environ un 1/5ème du poids du bébé.
-
L’hémostase
- L’hémostase est la capacité de l’utérus à se contracter pour éviter une hémorragie.
- Une fois le placenta sorti, le gynécologue ou la sage-femme masse doucement l’utérus pour favoriser sa contraction et s’assurer de la formation du globe utérin de sécurité.
- Ce geste peut être inconfortable en l’absence de péridurale mais n’est pas douloureux.
- Il est nécessaire car il permet de réduire le risque hémorragique.
B] La délivrance artificielle (en hébreu hafrada yadanit הפרדה ידנית)
- Lorsque le décollement du placenta ne s’est pas produit dans un délai de 30 à 45 minutes après la naissance du bébé, il peut être nécessaire de réaliser un geste pour aller chercher le placenta afin d’éviter une hémorragie.
- Ce geste est alors appelé délivrance artificielle.
- Sous anesthésie générale ou péridurale, l’obstétricien introduit sa main à l’intérieur de l’utérus pour décoller manuellement le placenta et l’extirper, afin que l’utérus puisse se contracter correctement et prévenir ou stopper ainsi l’hémorragie.
- Ce geste peut être réalisé plus tôt, en urgence, en cas d’hémorragie après la naissance du bébé.
- Ce geste est désagréable mais pas douloureux s’il est réalisé sous une anesthésie suffisamment efficace (réinjection de péridurale, rachi-anesthésie, ou anesthésie générale).
C] Révision utérine (en hébreu Revizia רוויזיה)
- Lorsqu’après l’expulsion du placenta, l’obstétricien a un doute sur l’intégrité de celui-ci ou des membranes, il peut décider de réaliser une révision utérine.
- Ce geste consiste à introduire la main à l’intérieur de l’utérus, toujours sous anesthésie, pour vérifier qu’il ne reste pas un bout de placenta ou de membranes à l’intérieur.
- Si tel est le cas, ces résidus sont extirpés manuellement jusqu’à ce que l’utérus soit vide.
- Le but à court terme est d’obtenir une bonne contraction de l’utérus et d’éviter une hémorragie, et à moyen terme, d’éviter une surinfection du matériel laissé à l’intérieur de l’utérus.
LES AIDES INSTRUMENTALES, DE QUOI S’AGIT-IL?
Qu’est-ce qu’une aide instrumentale ?
Lors de la dernière phase de l’accouchement, une fois que la têteest déjà engagée dans le détroit supérieur du bassin, le gynécologue peut avoir recours à différents moyens pour vous aider à mettre au monde votre enfant. Cette aide, appelée aussi extraction instrumentale, peut être réalisée à l’aide de forceps, de ventouse ou de spatules. Le choix de l’instrument dépendra principalement des habitudes et de l’expérience de l’obstétricien.
A] Les instruments
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Le forceps (en hébreu milkakhaïm מלקחיים)
- C’est un instrument métallique permettant de faciliter la sortie de la tête de l’enfant.
- Il est composé de deux branches s’articulant l’une avec l’autre, chaque branche comportant une cuillère et un manche.
- Le gynécologue peut l’utiliser pour aider au dégagement en exerçant une traction sur le manche ou pour orienter la tête dans le bon sens par un mouvement de rotation.
- Il existe plusieurs modèles de forceps dans le monde, mais l’obstétricien utilise généralement celui dont il a le plus l’habitude.
-
La ventouse (en hébreu vacuum ווקאום)
- La ventouse est utilisée comme instrument de flexion et d’extraction avec une traction limitée.
- Elle est reliée à un système d’aspiration contrôlée, permettant de faire adhérer la ventouse à la tête du bébé.
- Il existe des ventouses métalliques ou en silicone de différentes dimensions, réutilisables après stérilisation, ainsi qu’un modèle stérile à usage unique en plastique, appelé kiwi.
- L’intérêt du kiwi est qu’il intègre une pompe à main, permettant facilement d’obtenir le vide sous la cupule, sans nécessiter de moteur. Il est léger, autonome, facilement transportable, et rapidement utilisable car il n’a pas besoin de branchement électrique.
- La plupart des études scientifiques récentes montrent une diminution du risque de lésions périnéales graves avec la ventouse par rapport au forceps.
-
Les spatules de Thierry
- Les spatules de Thierry fonctionnent en écartant les parois du vagin, facilitant ainsi le passage du bébé.
- La tête du bébé reste libre de ses mouvements.
- Cette technique est peu utilisée en France et encore moins en Israël, en raison d’un risque accru de lésions périnéales graves.
L’utilisation d’un forceps, d’une ventouse ou d’une spatule relève de la décision prise par votre gynécologue en fonction de la situation, de sa formation, de son expérience, et du caractère d’urgence.
B] Les indications
Les indications pour une aide instrumentale peuvent être fœtales ou maternelles :
-
Indications fœtales :
- Anomalie du rythme cardiaque fœtal en fin de dilatation ou lors de l’expulsion.
- Durée d’expulsion trop longue avec un arrêt de la progression de la tête du bébé.
-
Indications maternelles :
- Insuffisance des efforts expulsifs, fatigue maternelle, tonicité du périnée.
- Contre-indications maternelles aux efforts expulsifs, telles que :
- Lésions oculaires, décollement de rétine.
- Antécédent de pneumothorax spontané.
- Insuffisance respiratoire, etc.
C] En général
- L’extraction instrumentale nécessite la mise en position gynécologique avec un éclairage suffisant pour contrôler le périnée.
- Elle ne peut pas être réalisée dans l’eau ou dans une baignoire.
- En général, elle est faite sous anesthésie loco-régionale (péridurale) ou locale.
- Elle est souvent accompagnée d’une épisiotomie, surtout en cas d’utilisation du forceps ou des spatules, afin de protéger le périnée et de diminuer le risque de lésions graves.
- Dans des mains bien entraînées, le risque de complications fœtales ou maternelles reste faible.
- Il est important de noter que le choix de l’extraction instrumentale n’est pas une alternative à la césarienne. En effet, la hauteur de la tête fœtale dans le bassin maternel est le seul critère pour décider d’une césarienne ou d’une extraction instrumentale :
- Si la tête est trop haute dans le bassin et n’est pas engagée dans le détroit supérieur, on passera directement à la césarienne sans tenter une extraction instrumentale, qui serait dangereuse et inefficace.
- Par contre, si la tête est engagée dans le bassin mais trop basse pour une césarienne, l’extraction instrumentale peut être réalisée.
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